Alors que la semaine européenne de la réduction des déchets commence, interview d’Antoinette Guhl, Adjointe à la Maire de Paris chargée de l’Economie sociale et solidaire, de l’Innovation sociale et de l’Economie circulaire.
Quelles sont les initiatives prises pour lutter contre le gaspillage à Paris ?
Dans le cadre des Etats généraux de l’Economie circulaire, tenus en 2015, la lutte contre le gaspillage alimentaire avait été identifiée comme un des axes majeurs de la mise en place de cette politique. Forte de ce constat, la ville de Paris s’est pleinement engagée dans cette lutte en adoptant à l’unanimité du Conseil de Paris en décembre 2015 le plan parisien de lutte contre le gaspillage alimentaire. Ce dernier repose sur trois axes d’action : la sensibilisation des habitant-es, l’action sur les commerces (marchés, distribution..) et la restauration (collective ou privée).
Depuis, nous avons mené plusieurs actions et plusieurs chantiers sont en cours :
Concernant la sensibilisation, Paris s’engage aux côtés de l’Etat lors du 16 octobre, journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire. Des agents de la ville sont déployés dans les magasins Monoprix pour sensibiliser les clients et leur donner des conseils pratiques. Cette année, nous avons offert 1500 brunchs aux parisiens sur le parvis de l’Hôtel de Ville. Concoctés par 8 grands chefs de la capitale, ces repas avaient pour objectifs de montrer qu’avec des invendus alimentaires de Rungis, il était possible de faire des plats de grande qualité gustative et visuelle.
Cet évènement a également été l’occasion pour les chefs parisiens de montrer leur engagement dans cette lutte. Ils ont signé une charte d’engagements, introduisant des principes tels que la valorisation du produit dans sa globalité et le travail en synergie avec l’ensemble de la profession.
Les restaurateurs avaient déjà été des partenaires de la Ville. En décembre dernier, nous avons distribué plusieurs milliers de box anti-gaspi aux restaurateurs de la capitale afin qu’ils les proposent à leurs clients.
Nous travaillons également sur les cantines scolaires. Cela passe par la réorganisation de la chaine de distribution (mettre le pain à la fin), le déploiement du « fait-maison » ou bien un conditionnement plus adapté aux besoins des enfants (découper les pommes en quartiers par exemple pour éviter de jeter des fruits entamés).
Les invendus alimentaires constituent également un élément à cibler pour lutter contre ce gaspillage. La loi Garot à cet égard fournit un arsenal législatif permettant d’agir sur la grande distribution. La ville de Paris a décidé d’intégrer aux délégations de service public conclues avec les prestataires gérant les marchés de la ville des dispositions pour que des conventions soient signées avec des associations qui ramassent les invendus et les redistribuent aux plus démunis.
Lors du Conseil de Paris du mois de novembre, 500 000 euros de subvention ont été attribués à ce genre d’associations (19 projets lauréats).
Nous avons également expérimenté le 100 % vrac à l’échelle d’un commerce lors de la COP21 avec un magasin Biocoop. Alors que cette expérimentation devait durer 2 mois, elle a été prolongée à 6 mois forte de son succès
Moins de déchets, est-ce synonyme de plus d’économies pour la collectivité ?
Le gaspillage alimentaire coûte 400 euros en moyenne par foyer et par an. Outre le coût écologie (le gaspillage alimentaire est le 3eme émetteur de GES après les USA et la Chine), c’est donc aussi un coût économique !
Une poubelle mal triée, coûte à la collectivité. Moins de déchets c’est aussi un coût moindre en matière de logistique. Par ailleurs, le traitement actuel des déchets repose principalement sur l’incinération qui a un coût économique et écologique fort sur la collectivité et donc sur les citoyen-nes.
Le zéro-déchet génère également des revenus ! ceux du compost, du réemploi, de la réutilisation ou bien du recyclage. Par exemple, Paris vend les pavés recyclés qui sont extraits des chantiers publics (nb : à prix coutant).
Le développement de l’économie circulaire peut générer 50k emplois pour l’IdF. C’est une économie de flux qui permet souvent de faire le lien entre les territoires (villes-campagnes pour le compost par exemple) et qui va au-delà du seul territoire parisien. C’est pour cela que les Etats généraux de l’Economie circulaire ont été élaborés avec les territoires du grand Paris.
Paris Zéro déchet c’est pour quand ?
Nous sommes déjà pleinement engagé dans le zéro déchet : nous avons comme objectif de mandature d’avoir une ressourcerie par arrondissement, notre commande publique a également été modifiée pour que nous puissions passer dans nos marchés d’une économie de la propriété à une économie de la fonctionnalité, évitant également des déchets. Nous travaillons également sur les déchets de chantier.