En France, une personne réfugiée pourtant forte de compétences et d’expériences diverses, met environ 5 ans à trouver un emploi stable. Cécile Pierrat Schiever s’attaque à ce problème avec son association Kodiko, en favorisant l’autonomie des personnes réfugiées dans la recherche d’emploi et leur insertion professionnelle.
Kodiko signifie « code » en grec : la mission de l’association est de transmettre aux professionnels réfugiés les codes du monde professionnel de notre pays, et aux professionnels français le goût de s’ouvrir aux autres, tout en transmettant leurs propres compétences et réseaux.
Le programme d’accompagnement a deux volets :
- un accompagnement individuel par un salarié d’une entreprise partenaire sur son lieu de travail, pendant 6 mois,
- des ateliers collectifs sur les outils de recherche d’emploi (posture, connaissance du secteur, networking…) animés par des bénévoles, coachs et experts en RH.
250 binômes réfugié-salarié ont ainsi été formés, permettant aux bénéficiaires accompagnés de reprendre confiance en eux et débouchant même, pour 1 personne réfugiée sur 2, sur une opportunité concrète à l’issue du programme d’accompagnement de 6 mois (CDI, CDD, stage, intérim ou formation qualifiante).
Quel est aujourd’hui l’enjeu principal de Kodiko ?
Nous voulons devenir un acteur référent de l’insertion professionnelle des réfugiés.
Notre ambition est donc d’aller encore plus loin en matière d’impact social, et pour cela, perfectionner notre programme, professionnaliser toutes les parties prenantes pour gagner en méthode et efficacité, et créer des synergies au sein de notre communauté, toujours plus nombreuse.
Kodiko doit aussi aller là où les réfugiés sont : après Paris, Tours et bientôt Orléans, notre objectif est de nous installer dans une nouvelle ville chaque année.
Nous testons également un nouveau parcours : définir son projet professionnel à long terme, grâce notamment à des ateliers utilisant l’intelligence collective, et un mentorat de 4 mois.
Enfin, nous devons consolider notre business model en diversifiant nos sources de financement.
Comment êtes-vous devenue entrepreneure sociale ?
J’ai grandi en Grèce, et après avoir vécu dans 7 pays différents, je suis arrivée en France il y a 5 ans. Ayant moi-même vécu les difficultés de la recherche d’emploi dans un pays dont on ne maîtrise pas les codes, j’ai souhaité m’engager pour répondre à cette problématique et faire profiter la France de ma richesse culturelle. Après de nombreuses rencontres inspirantes, avec notamment des réfugiés syriens et des chercheurs travaillant sur la problématique de l’emploi, j’ai rencontré Maÿlis, la co-fondatrice de l’association, et l’aventure Kodiko a commencé.
Sources d’expérience, d’ouverture au monde, de résilience… Les réfugiés sont des modèles pour nos entreprises ! Pour moi, il est vraiment important de changer le regard que l’on pose sur eux et de faire disparaître les stéréotypes car c’est prouvé : pour le pays, migration est synonyme de croissance, et non de récession !
Jusqu’ici, quels défis avez-vous rencontrés ?
Maintenir notre impact social : un défi quotidien ! Dans l’ESS, notre travail a un impact direct sur notre public, on ne peut donc pas se reposer sur ses lauriers. Il faut constamment être dans une dynamique de création et d’amélioration continue, car notre environnement évolue rapidement. C’est assez fatigant ! (rires)
Le changement d’échelle apporte également son lot de challenges : progresser en management pour donner envie à notre belle équipe de rester, innover dans notre recherche de nouveaux fonds et partenariats…
Quels conseils donneriez-vous à un·e futur·e entrepreneur·e ?
- Bien s’entourer, car cela permet d’avancer plus vite,
- Etre débrouillard et avoir les reins solides,
- Etre agile, dans une démarche d’apprentissage continu,
- Se consacrer pleinement à son projet (ne pas faire ça « à côté » d’un travail), tout en maintenant l’équilibre avec sa vie personnelle,
- Ne pas oublier de rêver et de faire rêver, garder en tête tout ce que l’on a à apporter aux gens.
Qu’est-ce qui vous fait vibrer au quotidien ?
Le double impact positif, à la fois sur les salariés accompagnants et sur les personnes réfugiées : c’est un échange gagnant/gagnant !
Les rencontres très riches au quotidien, avec tous les membres de la communauté de Kodiko.
Mon équipe, qui est vraiment top, constituée de personnes engagées et motivées.
Et enfin être créative, trouver de nouvelles idées tous les jours, me plaît.
Pourquoi avoir choisi d’adhérer au Mouves ?
Le Mouves nous permet de rencontrer d’autres entrepreneurs sociaux. On progresse continuellement, car chaque entrepreneur est une source d’inspiration à lui tout seul.
Les ateliers nous permettent de monter en compétences, sans passer par des formations payantes, souvent inabordables pour une association.