Ce mois-ci, nous avons été interroger Fayçal Boulkout, associé de CAPTE (Collectif d’Acteurs pour la Plantation et la Transition Environnementale). Découvrons sans plus tarder le portrait de cet entrepreneur social qui agit pour l’environnement :
Pouvez-vous m’expliquer votre parcours / comment êtes-vous devenu(e) entrepreneur(e) social ?
Nous sommes deux associés. Pour ma part, j’ai exercé pendant 15 ans le métier de responsable commercial et partenarial, notamment dans un grand groupe de l’économie sociale et solidaire bien connu ainsi que dans une start-up du mobile marketing qui a fini par être rachetée par fond d’investissement. J’ai décidé de démissionner pour revenir à une activité qui donne du sens à ma fonction.
En 2015, Edouard a complété son parcours d’entrepreneur et son expérience en Colombie en réalisant en France une formation-pilote préparant au diplôme de conseiller-technicien en agroforesterie. C’est dans ce cadre qu’il a réalisé une étude de terrain en Tunisie sur les écosystèmes agroforestiers en milieu méditerranéen.
Nous étions tous les deux très préoccupés par les enjeux liés aux changements climatiques comme par ceux de la justice sociale et environnementale. Nous avons donc imaginé un concept innovant, pour participer à la transition agricole et environnementale, et à l’expression de nouvelles solidarités climatiques transnationales plus que jamais nécessaires.
Notre volonté de travailler au plus près de la nature et du monde du vivant, notre solide amitié de plus de 10 ans, la complémentarité de nos expertises, l’évidence de l’utilité de s’inscrire dans le territoire méditerranéen, sont autant d’enjeux qui nous rassemblent autour du projet CAPTE, profondément ancré dans l’ère numérique, les agroforesteries et l’éducation.
Comment s’organise votre projet ?
Depuis un peu plus d’un an, nous faisons partie de l’incubateur d’innovation sociale Inter-made. Aujourd’hui, le projet CAPTE (Collectif d’Acteurs pour la Plantation et la Transition Environnementale) regroupe une SAS et des associations d’agriculteurs en Tunisie, en France et en Colombie. Nous collaborons avec des partenaires et experts seniors. CAPTE s’organise autour de 3 pôles : un pôle plantation, un pôle numérique et un pôle éducation-sensibilisation.
Nous proposons aux entreprises de compenser leurs émissions de gaz à effet de serre via la plantation d’arbres et l’installation de systèmes agroforestiers. Elles peuvent ainsi contribuer à lutter contre le réchauffement climatique et développer la solidarité auprès des agriculteurs, premières victimes de ses conséquences. Ce sont eux nos bénéficiaires directs.
Nos projets de plantation d’arbres et nos systèmes agroforestiers sont en cours de développement au sein de trois pays : Tunisie, Colombie et France. Nous pouvons aussi réaliser des projets sur mesure au sein des filières d’approvisionnement de matières premières des entreprises (par exemple : café, cacao, latex, etc.).
Pour les entreprises, la force de notre projet réside dans la complémentarité entre numérique et agroforesteries. Autrement dit, en collaborant avec CAPTE elles peuvent allier des dispositifs numériques innovants aux plantations qu’elles vont financer dans le cadre de leur stratégie climat-carbone. Actuellement, nous développons une plateforme innovante de mesure et de valorisation des services écosystémiques permettant une gestion collaborative, transparente et sécurisée des arbres plantés. De plus, nous mettrons bientôt à disposition une web application gamifiée afin de communiquer, fédérer et susciter la curiosité des collaborateurs, des clients et des particuliers avec plusieurs éléments différenciants par rapport à nos concurrents. Cette solution sera disponible en marque blanche. Elle pourra être adossée à une stratégie digitale sur mesure permettant de comprendre le comportement des utilisateurs et de stimuler l’engagement sur ces sujets. On envisage aussi une solution pour les market place (API) mais nous sommes tout juste au début sur cet axe. Nous échangeons avec quelques experts et devons rencontrer de potentiels partenaires. Le e-commerce responsable, neutre en carbone, est un vaste sujet.
Enfin, à travers notre pôle éducation-sensibilisation, nous développons un premier jeu d’animation gratuit pour les plus petits.
Pour CAPTE, la combinaison agroforesteries, éducation et numérique est la réponse la plus pertinente pour faire face aux enjeux du réchauffement climatique.
Quels sont les enjeux de votre structure ?
Il s’agit clairement de lutter contre le réchauffement climatique et notamment contre ses conséquences auprès des agriculteurs. Nous voulons nous attaquer à ce qui s’annonce comme l’enjeu du siècle. Les bénéfices des arbres sont multiples : l’arbre va capter du carbone, régénérer et préserver les sols, la biodiversité, la ressource en eau. Il va aussi créer de nouvelles sources de revenus pour l’agriculteur tout en améliorant la qualité des produits que nous consommons. Enfin, c’est un formidable moyen de développer des actions au niveau socio-culturel : sensibilisation à l’enjeu du climat auprès de la nouvelle génération, des clients, des salariés, créer de nouveaux emplois au service de l’humain et de la nature, embellir le paysage, promouvoir et valoriser des savoir-faire locaux.
Quels sont les obstacles que vous avez surmontés ?
Comme toutes les jeunes pousses en phase de démarrage, nous avons besoin de davantage de moyens financiers et humains pour développer notre activité. Dans notre cas, il s’agit des plantations, de générer nos premiers crédits carbone et de finaliser nos prototypes numériques. La génération de nos premiers crédits carbone est prévue pour la fin de l’année 2019. Il va falloir trouver un bon équilibre d’ici là. Heureusement, nous sommes en discussion avec des partenaires potentiels qui pourraient précommander des crédits et acheter des arbres. Nous avons d’ailleurs d’ores et déjà vendu plus de 1000 arbres. Nous envisageons aussi une opération de financement participatif, nous allons rencontrer différentes plateformes spécialisées au cours des prochaines semaines.
Avez-vous un conseil à donner pour un nouvel entrepreneur social ?
Lancez-vous ! Nous sommes certains que les entrepreneurs sociaux sont en train de rendre le monde meilleur, et qu’il suffit pour cela que chacun d’entre nous fasse de petits efforts. On se retrouve parfaitement dans la légende amérindienne du « petit colibri ». Par ailleurs, on constate chaque jour qu’il y a un réel mouvement de citoyens qui imaginent de nouvelles manières de vivre, de travailler, d’expérimenter, en plaçant la nature et l’humain au cœur de leur projet.
Pourquoi avez-vous adhéré au Mouves ?
Parce que le Mouvement des entrepreneurs sociaux rassemble et développe une communauté dans laquelle nous nous reconnaissons pleinement. En donnant de la visibilité au modèle de l’entrepreneuriat social, le Mouves agit dans le même sens que nous. Il représente aussi une formidable occasion de peser auprès des décideurs, de l’écosystème politique et économique. De plus, il apporte des conseils, des compétences, des contacts business. Je n’aurais qu’une seule chose à dire à celles et ceux qui hésitent encore : adhérez ! Ensemble, nous sommes plus forts.