Yann Le Portal – Symbiosphère

« Insecte cherche colocataire dans gîte sympa », « Nichoir idéal, local et écologique,vue imprenable et ensoleillée », voici quelques petites annonces glanées sur le site de Symbiosphère

Et pour cause ! Cette entreprise sociale conçoit, depuis 2015, des refuges en bois destinés à redonner une place au vivant au sein du tissu urbain. Nichoirs, hôtels à insectes, gîtes à chauves-souris, ces refuges participent à restituer des lieux de vie favorables à la biodiversité locale aujourd’hui menacée.

Structurée en SCOP, Symbiosphère se déploie sur la base d’une coopération entre menuisiers et écologues et s’adresse tant aux particuliers, qu’aux entreprises et collectivités. Avec au cœur de la démarche l’idée de replacer l’homme au centre et de mettre en œuvre un modèle respectueux de l’environnement.

Interview – Yann Le Portal, cofondateur

Comment êtes-vous devenu entrepreneur social ?

Animé par l’envie de travailler au contact des animaux, j’ai fait le choix d’une formation en écologie orientée vers le comportement animal. Mes premières missions m’ont amené à travailler sur des populations de chevreuils, d’ours bruns, de loutres… Avec une approche statistique, j’étudiais le déplacement des animaux au moyen de leurs colliers GPS. En tant qu’ingénieur environnement, j’ai ensuite travaillé sur les perturbations du milieu aquatique liées aux pesticides. C’est cette seconde expérience qui m’a donné l’idée de créer Symbiosphère.

Pour réduire l’usage des pesticides, et notamment des insecticides, il est en effet nécessaire de développer des méthodes alternatives. Favoriser les prédateurs naturels présents dans le milieu en est une puisqu’elle permet de réduire les populations moins désirables. Citons par exemple la coccinelle qui se nourrit de pucerons ou la chauve-souris prédatrice du moustique. Symbiosphère favorise ces prédateurs naturels en contribuant, au moyen de refuges en bois, à restituer leurs lieux de vie menacés.

L’entreprise a été créée avec mon ancienne binôme de faculté, Leslie Faggiano, aujourd’hui docteure en écologie ainsi qu’avec mon frère, Pierre Le Portal, menuisier qualifié.

Qu’est-ce qui fait la spécificité de Symbiosphère ?

Nous avons eu à cœur de penser un modèle de production qui soit le moins impactant pour l’environnement. Tous nos approvisionnements se font en circuits courts. Le bois est issu de forêts gérées durablement et situées à moins de 200km de notre atelier (Tarn, Ariège, Landes). Tous nos déchets sont 100 % recyclables et même valorisés en autres produits. Les chutes de bois sont broyées et réutilisées pour le paillage de jardins, les box de chevaux ou les toilettes sèches.

La coopération est aussi au cœur de notre entreprise. Le statut SCOP nous a séduits car il permet de replacer l’humain au cœur de l’outil de travail. L’idée que l’outil « Symbiosphère » ne soit pas une entité qui nous appartienne mais qu’elle puisse vivre et perdurer, je l’espère, avec ou sans nous, me plait beaucoup.

Sur le plan de notre offre, nous avons démarré par la création de notre atelier de menuiserie et la conception de refuges en bois adaptés au vivant. Un ensemble de services a ensuite été proposé autour de l’installation, du suivi écologique et de la maintenance de ces refuges. Ce second aspect est essentiel car il est peu répandu. Aujourd’hui, il est possible d’acheter des nichoirs produits en Chine, à bas coût, sans même connaître l’espèce d’oiseau qu’ils peuvent accueillir. Symbiosphère offre ce conseil : quelles espèces peuvent nicher dans un refuge ? A quelle époque de l’année les observer ? Comment installer un refuge de manière optimale ?

Quels obstacles avez-vous rencontrés et comment les avez-vous surmontés ?

Nous n’avons pas rencontré beaucoup d’obstacles si ce n’est, au démarrage, le délai important imposé par les banques pour débloquer leur financement. Toutefois, nous avions un apport conséquent pour créer la société et cela nous a permis d’investir et de faire face aux premières charges en lançant rapidement l’activité. Lorsque nous avons finalement reçu notre financement, notre atelier était déjà opérationnel et cela nous a permis de nous appuyer sur une trésorerie confortable pour nous lancer.

Des conseils pour un futur entrepreneur social ?

Les délais d’obtention des financements étant longs, il est important d’anticiper au maximum l’étape de la levée de fonds par rapport au lancement de l’activité.

Se faire accompagner est important mais il faut aussi savoir prendre du recul par rapport aux conseils prodigués notamment sur l’étude de marché, le business plan. Il faut se faire confiance. Les dynamiques sont aujourd’hui différentes de celles qu’ont pu connaître certains accompagnateurs, parfois retraités, et ayant évolué dans le monde économique il y a déjà quelques années.

Quels sont vos enjeux de développement actuels ?

Nous développons un nouveau projet intitulé « Faucon’S Bouge ! » à destination des collectivités. Sa vocation est de répondre à l’enjeu de la perte d’habitats en milieu urbain pour de nombreuses espèces animales. Aujourd’hui, les particuliers qui nous achètent des refuges habitent souvent en zone périurbaine, où ils ont des jardins, des arbres… Avec « Faucon’S Bouge ! », l’idée est de permettre l’installation de nichoirs en ville en faisant participer les habitants.

Nous avons imaginé un modèle économique, en circuit court, allant de l’arbre coupé au nichoir installé. Pour cela, nous souhaitons proposer un système de financement participatif qui permette aux habitants d’une ville de constituer une cagnotte servant à financer l’installation de nichoirs sur leur territoire. Ces nichoirs seront ensuite connectés à une application Smartphone permettant de les localiser dans la ville et d’obtenir des informations sur les espèces qui y nichent (photos, chants, cycle de vie…). Nous espérons concrétiser ce projet en 2018 en partenariat avec la Ville de Toulouse.

Pourquoi avoir rejoint le Mouves ?

C’est la coordinatrice du Mouves qui, à l’origine, m’a parlé du mouvement et je me suis rendu compte que plusieurs entrepreneurs que je connaissais étaient adhérents. Cela a suscité ma curiosité. J’y ai découvert des personnes intéressantes. Le Mouves permet de faire du réseau, pas forcément dans une optique « business », mais plus pour du partage d’expériences.

En savoir plus :

Symbiosphère : www.symbiosphere.fr

Projet “Faucon’S Bouge !” : https://fauconsbouge.com

 

 

 

 

 

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