Portrait croisé de Fabien et Emilie Schmitt – Activ’action

Activ’action est une association qui a été créée il y a quatre ans, nous sommes 3 co-fondateurs, nous deux et Pauline. On a créé Activ’action parce qu’on était nous-mêmes en recherche d’emploi et qu’on a été touchés de plein fouet par les conséquences psychologiques négatives du chômage : isolement social, perte de confiance en soi, perte de l’estime de soi, de l’ambition… et le but. En réfléchissant à notre parcours personnel et aux études scientifiques sur la question, on s’est rendus compte qu’en fait l’impact psychologique négatif du chômage c’était un des premiers freins au retour à l’emploi alors qu’on n’en parlait pas, ce n’était pas pris en compte dans l’accompagnement vers l’emploi et du coup on a créé ce que l’on aurait voulu avoir à ce moment-là. Notre volonté c’est de réduire cet impact psychologique en changeant les mentalités sur la façon dont on vit et on perçoit le chômage et faire en sorte de le transformer en vraie opportunité, une vraie expérience constructive parce que justement ça peut être une opportunité pour rencontrer plein de nouvelles personnes, développer ses projets, ses compétences, aller vers un emploi satisfaisant et aller vers un épanouissement professionnel et personnel plus important.

Emilie : Mon rôle dans la structure c’est de m’occuper de la partie stratégique, de son développement et sa cohérence, s’assurer que tout ce qu’on met en œuvre correspond bien à nos valeurs et à nos principes d’action, formaliser tout ça, après tout ça se décline au quotidien dans les ateliers qu’on propose, dans les formations mais ça peut être aussi dans la structuration interne : notre équipe, quels outils on utilise au quotidien pour faciliter le travail des bénévoles, etc… Je gère aussi la communication, comment elle s’adapte à notre stratégie, à nos valeurs et à nos principes d’action. J’ai également toute la partie administrative et financière de la structure.

Fabien ; Je me charge de développer des accompagnements spécifiques basés sur notre vision et nos différentes méthodologies […] auprès de publics qui font face à des problématiques spécifiques : des problèmes d’addiction, des personnes très éloignées de l’emploi qui sont au RSA, des familles isolées dans les quartiers politiques de la ville…) Donc je suis en charge, de la construction des programmes d’intervention et du coup des interventions aussi en elles-mêmes puisque la volonté est aussi de pouvoir transmettre ces méthodes et cette vision là au sein même de structures pour que ça puisse nourrir aussi l’accompagnement individuel que proposent ces différentes structures. Je m’occupe également de la construction partenariale, mais aussi de notre offre de formation ; puisqu’au sein d’Activ’action on forme des professionnels au sein des structures d’insertion, aussi bien à notre posture, parce que la notion de posture est fondamentale dans ce qu’on propose, qu’aux différents outils et méthodes qu’on a pu créer et mettre en place.

Comment êtes-vous devenu(e) entrepreneur(e) social ?

Fabien : Pour moi l’entreprenariat social c’est quelque chose qui s’est construit un peu au fur et à mesure et j’ai presque envie de dire par « concours de circonstances » puisque ce n’était pas quelque chose que je connaissais avant de rencontrer Emilie. Dans mon parcours j’ai commencé par un DUT en communication, j’ai travaillé pendant plusieurs années dans les relations publiques dans le milieu brassicole pendant plusieurs années, suite à ça j’ai quitté mon emploi pour me lancer un petit défi personnel qui était de partir en Australie parce que tout simplement je m’ennuyais dans mon métier et à mon retour en France j’ai connu une deuxième période de recherche d’emploi qui a provoqué une volonté de vouloir changer de voie et d’expériences donc j’ai d’abord fait un peu de bénévolat dans l’organisation de concerts sur Strasbourg et ensuite j’ai fait un service civique et c’est là que j’ai rencontré Emilie puisqu’on a fait un service civique au sein du même organisme : Uniscité. Puis j’ai entamé une reconversion pour devenir assistant de service social que je n’ai pas terminé, j’ai arrêté au bout de ma deuxième année, pour retravailler dans le milieu brassicole. A la fin de mon contrat, j’ai eu à nouveau une période de recherche d’emploi. C’est à ce moment-là qu’avec Emilie on s’est retrouvés et on a discuté et eu la volonté de pouvoir monter un projet, avec une vision forte pour changer de regard par rapport à ces périodes de recherche d’emploi là. Activ’action a commencé à ce moment-là. J’ai eu une petite période au début où je travaillais à côté, notamment dans l’organisation de formation dans le milieu chirurgical et ensuite j’ai rejoint Activ’action à plein temps.

Emilie : Moi depuis toute petite je savais que j’avais envie d’avoir ma structure à un moment donné, d’être entrepreneure, par contre le terme « entreprenariat social » n’existait pas à l’époque donc mon plan c’était de faire des études, de travailler dans une grande boîte, d’apprendre plein de choses et de pouvoir monter une structure à vocation sociale à côté en utilisant les meilleures pratiques que j’aurai apprises par le passé et comme Fabien finalement, concours de circonstances, après mes études, contre toute attente je me suis retrouvée au chômage, je cherchais même des boulots en dessous de mes compétences et je ne trouvais pas et donc l’idée d’entreprendre tout de suite après mes études s’est imposée à ce moment-là. J’ai découvert « l’entreprenariat social » quand j’avais une vingtaine d’années, je connaissais surtout le concept de « développement durable » et puis je suis tombée sur des structures comme Ashoka ou disco soupe… et c’est là que j’ai découvert qu’en fait c’était possible d’avoir une entreprise qui avait une vocation sociale, et qu’on n’était pas obligé d’avoir une entreprise pour gagner de l’argent pour faire de l’associatif à côté, on pouvait aussi avoir une entreprise sociale ! Je m’orientais plus vers quelque chose dans le droit des femmes ou l’environnement et en fait le chômage s’est imposé parce qu’on vivait la situation de plein fouet et que j’ai trouvé ça vraiment horrible et surtout très injuste par rapport aux sacrifices que j’avais pu faire dans ma vie dans mes études. Du fait de l’avoir vécu personnellement, on a vu l’impact sur la vie de personnes de notre entourage, ça détruit des vies. Ça s’ajoute à l’injustice et franchement quand tu le vis et que tu vois un peu les études qui disent que la majorité des gens vont vivre ça, c’est pas du tout le futur dans lequel on a envie de vivre et je pense que quand tu es jeune tu as encore cette naïveté pour te dire que tu vas changer le monde.

Quels sont les obstacles que vous avez surmonté ?

Emilie ; le manque de légitimité et de crédibilité ça a vraiment été le gros obstacle depuis le début parce qu’on se lançait sur un marché soi-disant ultra concurrentiel où on nous disait qu’il y avait déjà plein de structures de l’accompagnement. On avait pas non plus les compétences, on venait pas du domaine, aucun de nous n’a fait d’études dans le domaine ou l’insertion professionnelle, on était super jeunes, donc on a très vite été regardés de haut par pas mal de gens qui nous disaient qu’on arriverait pas à faire bouger les choses, que ça ne servait à rien. Je trouve que c’est vraiment difficile quand on se lance, parce qu’on est déjà soi-même jeune et pas super confiant, ce sont des gros choix de vie que l’on a fait et en plus de ça tu as des gens qui te disent que ce que tu fais ne sert à rien, ça c’est le plus gros obstacle pour moi.

Fabien ; Pour compléter ça, parce que je suis complètement d’accord et j’allais dire la même chose, ce qui est intéressant c’est de voir que cette crédibilité, cette légitimité et cette reconnaissance par rapport à la structure, aujourd’hui, elle est présente et elle a pu se construire au fur et à mesure sur les actions de terrain qui ont été menées et c’est quand on montrait nous, au fur et à mesure que c’était possible et que oui, il y avait un impact, que du coup on a pu construire cette légitimité et cette crédibilité. C’est au fur et à mesure d’ateliers qu’on a pu construire une communauté et c’est la force de cette communauté qui a pu faire qu’Activ’action grandisse.

Quels sont les enjeux actuels de votre structure ?

Notre enjeu principal aujourd’hui c’est qu’on voudrait ouvrir un pôle plaidoyer pour vraiment pouvoir porter plus haut les valeurs et les principes d’action d’Activ’action et ainsi prouver que c’est possible pas que dans notre communauté et ce qu’on fait au quotidien avec Activ’action, mais qu’un esprit peut vraiment changer la posture de millions de personnes au niveau national et international si on permet aux acteurs du marché de l’emploi de se former, d’agir autrement et de pouvoir décider autrement aussi.

Trois conseils pour un nouvel entrepreneur social ?

Fabien : Y Croire quoi qu’il arrive, se remettre en question et un dernier conseil : communiquer. Mais pas uniquement communiquer sur sa structure mais communiquer et échanger régulièrement tout le temps sur sa propre expérience de l’entreprenariat, avec son équipe et son entourage, je pense qu’avec Activ’action si on en est là aujourd’hui c’est aussi grâce à l’équipe qu’on a actuellement et qui fait qu’aujourd’hui on a toujours cette énergie et cette conviction, en fait.

Emilie : Moi je dirais se lancer, tester parce que c’est la meilleure façon de voir si ça marche, de tester un besoin, de voir si on y répond. Ensuite ce serait de rester sensible, que ce soit à l’injustice qui fait qu’on devient entrepreneur social, rester sensible aux retours des uns des autres et garder cette sensibilité je trouve que c’est la plus belle des qualités chez les entrepreneurs sociaux, ressentir ça, et ce qu’il faut améliorer, alors que quand on est pris dans le quotidien de l’entreprenariat on peut être happé par des obligations qui nous dévient de ça et je pense que c’est important de garder cette sensibilité. Et mon troisième conseil serait de travailler dur pour réaliser un rêve, ce qui n’est pas la même chose que travailler dur au final, tu peux faire des semaines à 70 heures mais tu sais pourquoi donc tu ne le vois pas comme une contrainte.

Pourquoi avez-vous adhéré au MOUVES ?

Parce que Laurie et Marie étaient sympa ! *Ils rient tous les deux*.  En fait ce que j’ai dit par rapport à la communication, être au MOUVES c’est justement de pouvoir rencontrer et se faire un réseau c’est une notion hyper importante. Suite à un évènement auquel nous avons été invités à pitcher par exemple, cela nous a permis d’être recontactés par la suite parce qu’on avait entendu parler de nous dans cet évènement-là, donc ça nous a aussi apporté une visibilité bienvenue. Tout ça en plus d’être entourés de gens qui ont le même rêve de société que nous, et communiquer ça à notre écosystème également.

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